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Le langage est un jardin...
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Le langage est un jardin
Que la pierre et l'eau composent
Car de chaque mot s'échappe
Insaisissable une
Que la pierre et l'eau composent
Car de chaque mot s'échappe
Insaisissable une
eau claire
Mais chacun d'eux va s'é-
cri r
e
Resserré
sur lui-même
Qui recèle
une pierre
cri r
e
Resserré
sur lui-même
Qui recèle
une pierre
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À la manière (à la main) du jardin zen du temple Myōshin-ji (Kyoto) |
Grand Cahier.412.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.01
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L'amateur de prunus
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Et quand il fait froid
il faut aller voir éclore,
si l'on a de l'amour,
les fleurs de prunus
il faut aller voir éclore,
si l'on a de l'amour,
les fleurs de prunus
Il y a bien des méthodes,
sans y aller à
dos de mule comme le
fit Meng Haoran
sans y aller à
dos de mule comme le
fit Meng Haoran
Ceux qui aiment la montagne emporteront avec eux une tente fermée sur trois côtés et ouverte sur l'avant comme un filet de chasse. Et puis dessous, beaucoup de charbons pour réchauffer l'arack
Ceux qui aiment à façonner leur jardin disposeront plusieurs écrans de papier recouverts d'un toit plat. Et dans les quatre directions, une fenêtre ouvragée qui s'ouvre et qui se ferme, selon l'endroit des fleurs
On suspendra près de l'entrée cette inscription
« Logis pour s'approcher des fleurs »
Parmi celles-ci, un panonceau planté dira
« Fleurs des distances raccourcies »
« Logis pour s'approcher des fleurs »
Parmi celles-ci, un panonceau planté dira
« Fleurs des distances raccourcies »
Grand Cahier.430.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.02
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On dit que le bambou...
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On dit que le bambou s'écrit depuis les Yin – c’est le texte disparu des légendes Les feuilles du bambou sont pinceau et encre
Il y eut une époque où les signes étaient encore parlant, étaient graphe de corbeaux effrayés, simulation en aile de libellule, serrement des griffes du passereau
Dans le jardin petit comme un grain de moutarde
est caché l'univers
est caché l'univers
Dongpo dit qu'il ne faut pas ignorer la loi du bambou et met en garde celui qui additionnerait joint à joint, feuille à feuille plutôt que de peindre les rides. Car déjà les turions possèdent les nœuds et le vide et ne font que reprendre en grandissant ce qu'ils possèdent déjà
On dit que la note jaune fut produite pour la première fois par le maître de musique Liung Liun. Du chaume d'un bambou, cueilli à l'ouest de Dahai dans le val de Yeqi, tube taillé de longueur précise et rempli de grains, est issu la mesure initiale des douze sons, la hauteur absolue qui fut à n'en pas douter le fa
Dans son registre généalogique du bambou, Dai Kaishi nous dit qu'il se distingue des autres herbes, des autres arbres
(le matin
on le plante
le soir
on y prend le frais),
qu'il est modeste, fin, ferme, inflexible et qu'il ne craint pas la neige, tous caractères qui font de lui un gentilhomme
Lorsque l'empereur Shun au cours de son voyage mourut de fatigue dans le sud de la Chine, on dit que ses épouses le pleurèrent jusqu'à Xiangjiang, la rivière du Hunan, et que leurs larmes tombèrent sur des bambous, y laissant des taches
Les brins de bambous tachetés de larmes
sont émetteurs de sentiments
dit un poème
sont émetteurs de sentiments
dit un poème
Grand Cahier.431.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.03
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Paoxi autrefois...
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庖犧
Paoxi autrefois gouvernait l'univers. Levant la tête, il observait du ciel les phénomènes. Abaissant son regard, il connaissait de la terre les principes
Sur le pelage des bêtes il notifiait les motifs comment ils s'accordent à l'entour
Il recensait proche les différents corps de son environ- nement les êtres plus subtils les choses des régions éloignées
Alors il élabora les Huit Trigrammes des Mutations et transmis leurs lois aux générations suivantes
神農
Vint le temps où gouverna Shennong. Au moyen de cordelettes à nœud, il réglait les activités. Les métiers se diversifièrent, les arts s'épanouirent
倉頡
Cangjie, le scribe de l'Empereur Jaune remarqua les empreintes laissées au passage par les pattes des oiseaux et dit que l'on pouvait distinguer ainsi les espèces en observant leur aspect
Il inventa écrivit les actes
Qui facilitent l'administration des artisans et le contrôle des multitudes, qui mettent en œuvre depuis la cour royale les décisions manifestées et permettent la propagation des savoirs, la consignation des octrois du prince aux vassaux
C'est en fixant les vertus que l'on obtient le respect
Shuowen Jiezi, postface
Grand Cahier.473.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.04
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Cang Jie
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La littérature à proprement parler, ça n’est pas très intéressant. Le rythme la rime le vers…
Des bouts du Temps, ils soufflent dans leur corne les deux Roland – mais à quoi bon l’universel quand le monde prend fin, que tout est sabordé
Qu’est-ce donc que cet écartement des rails défini du bureau des méthodes. Enjamber la traverse, décompter les minutes
Écho, tête folle, ne sais-tu que redire ?
Mais les mots qui s'alignent. Caractères, à eux seuls repliés, côte à côte et qui forment une phrase
Cang Jie
Les chinois calligraphient de naturel leurs caractères et cette expression du bout des doigts n'admet pas le repentir, cette vue plongeante, ils l'appellent poésie
Chaque élément d'une phrase dans sa chair temporelle de sens et de sons est un trait du pinceau
Une flèche à tirer vers l'oiseau – Apercevoir sur la neige d'une aile fracassée les trois gouttes de sang
Grand Cahier.474.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.05
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Tanière
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L'univers
et ses milliards de temps et d’espaces
contenu dans
son maintenant insaisissable
n'est qu'un petit endroit qui s'agite,
un petit endroit neuronale
dans ta cervelle
où dehors et dedans
s'entremêlent : rouille et cendre
Et ce n'est que rarement
que tu fréquentes ces circuits
trop occupé par l'atelier de ton corps,
par la courbe des chemins
qu'il emprunte
Et des rencontres éphémères,
ces autres corps
qui le distraient,
le nourissent
et parfois l'égarent
Mais dis-toi bien qu'un jour
ce petit réduit si
vaste sera ta
tombe
et ses milliards de temps et d’espaces
contenu dans
son maintenant insaisissable
n'est qu'un petit endroit qui s'agite,
un petit endroit neuronale
dans ta cervelle
où dehors et dedans
s'entremêlent : rouille et cendre
Et ce n'est que rarement
que tu fréquentes ces circuits
trop occupé par l'atelier de ton corps,
par la courbe des chemins
qu'il emprunte
Et des rencontres éphémères,
ces autres corps
qui le distraient,
le nourissent
et parfois l'égarent
Mais dis-toi bien qu'un jour
ce petit réduit si
vaste sera ta
tombe
Grand Cahier.765.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.06
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Complément au jardin
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Li Yu |
Li Yu note
Au gré de ses humeurs oisives
Combien le cheminement des soucis est complexe
Ceux-ci n'arrivent
Que sous deux sortes
En vérité
Soit on peut s'y préparer
Soit il est impossible d'y échapper
Sur ces considérations, il décida provisoirement
De faire travailler son pinceau
Remplaçant à son avantage
L'hémérocalle
– Ne lui fit-elle pas oublier, belle un jour
Elle aussi les soucis
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Hémérocalle Yun Shou Ping [恽, yùn, 寿平] (1633-1690) |
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Oeuvres de Li Yu (Li Liweng) 1610-1680 (Ed. collective v. 1730) |
Grand Cahier.436.Les jardins sont un langage.038.l'Harmonie.07
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