Sur les traces d'une personne

improbable


*

C’est dommage mais la rive d’en Face ne sera jamais La rive d’Ici

Dans ces impressions décousues, je ne dis plus rien car il n'y a plus rien à dire (les dieux se sont retirés depuis trop longtemps)

n’existe plus aucun dieu susceptible de rassembler les sens de nos nerfs cérébraux

Nous ne lutterons pas contre l’inexorable mais nous nous pencherons plein de scrupules et minutieux d’éruditions sur le livre des sensations de notre vie

Ni seul et dans la chambre silencieux ni bavardant au milieu de la foule Mais sur le seuil à l’écoute et chantant
À mi-voix




Carta a Mário de Sá-Carneiro - 14.03.1915

Estou num daqueles dias em que nunca tive futuro. Há só um presente imóvel com um muro de angústia em torno. A margem de lá do rio nunca, enquanto é a de lá, é a de cá, e é esta a razão intima de todo o meu sofrimento. Há barcos para muitos portos, mas nenhum para a vida não doer, nem há desembarque onde se esqueça. Tudo isto aconteceu há muito tempo, mas a minha mágoa é mais antiga.
Lettre à Mário de Sá-Carneiro - 14.03.1915

Je suis dans un de ces jours où je n'ai jamais eu de futur. Il n'y a qu'un présent immobile avec autour un mur d'angoisse. Cette rive là-bas du fleuve, puisqu'elle est de là-bas, elle n'est jamais d'ici, et c'est la raison intime de mon tourment. Il y a des ports pour bien des bateaux, mais aucun n'existe pour une vie sans souffrance, ni de débarcadère où l'on puisse oublier. Tout ceci est arrivé il y a longtemps, mais ma tristesse est plus ancienne.




Livro do desassossego 12-1

Invejo – mas não sei se invejo – aqueles de quem se pode escrever uma biografia, ou que podem escrever a própria. Nestas impressões sem nexo, nem desejo de nexo, narro indiferentemente a minha autobiografia sem factos, a minha história sem vida. São as minhas Confissões, e, se nelas nada digo, é que nada tenho que dizer.
Le livre de l'intranquillité 12-1

J'envie – sans bien savoir si je les envie – ceux dont on peut écrire la biographie, où qui peuvent l'écrire eux-même. Dans ces impressions sans liens entre elles, ni désir de liens, je raconte avec indifférence mon autobiographie sans événement, mon histoire sans vie. Ce sont mes Confessions, et si je n'y dis rien, c'est que je n'ai rien à dire.





Livro do desassossego 1-3


O coração, se pudesse pensar, pararia.


A quem, como eu, assim, vivendo não sabe ter vida, que resta senão, como aos meus poucos pares, a renúncia por modo e a contemplação por destino?


Não sabendo o que é a vida religiosa, nem podendo sabê-lo, porque se não tem fé com a razão; não podendo ter fé na abstração do homem, nem sabendo mesmo que fazer dela perante nós, ficava-nos, como motivo de ter alma, a contemplação estética da vida.

 
E, assim, alheios à solenidade de todos os mundos, indiferentes ao divino e desprezadores do humano, entregamo-nos futilmente à sensação sem propósito, cultivada num epicurismo subtilizado, como convém aos nossos nervos cerebrais.

Retendo, da ciência, somente aquele seu preceito central, de que tudo é sujeito às leis fatais, contra as quais se não reage independentemente, porque reagir é elas terem feito que reagíssemos; e verificando como esse preceito se ajusta ao outro, mais antigo, da divina fatalidade das coisas, abdicamos do esforço como os débeis do entretimento dos atletas, e curvamo-nos sobre o livro das sensações com um grande escrúpulo de erudição sentida.
Le livre de l'intranquillité 1-3


S'il pouvait penser, le cœur s'arrêterait.


A ceux, mes rares semblables, vivant comme moi sans savoir vivre, que reste-t-il sinon, le renoncement pour mode de vie et la contemplation pour destin ?


Ne sachant ce qu'est la vie religieuse, et ne pouvant le savoir, car la foi n'est pas l'affaire de la raison; ne pouvant avoir foi dans cette abstraction de l'homme, ni même savoir ce que nous pourrions en faire, il ne nous restait, comme motif pour avoir une âme, que la contemplation esthétique de la vie.


Et, ainsi, étrangers à la solennité de tous les mondes, indifférents au divin et dédaigneux de l'humain, nous nous livrons futilement à la sensation sans objet, cultivant un épicurisme très subtil, comme il convient à nos nerfs cérébraux.

Ne retenant de la science que son précepte central, qui veut que tout soit soumis à des lois imparables, contre lesquelles on ne peut réagir de façon indépendante, car vient d'elles le réagir qui fait que nous réagissons, et constatant que ce précepte s'ajuste à cet autre, plus ancien, de la divine fatalité des choses, nous renonçons à tout effort comme les chétifs, à l'entrainement des athlètes, et nous nous penchons sur le livre des sensations avec un grand scrupule d'érudition ressentie 




Livro do desassossego 2

Tenho que escolher o que detesto — ou o sonho, que a minha inteligência odeia, ou a ação, que a minha sensibilidade repugna; ou a ação, para que não nasci, ou o sonho, para que ninguém nasceu.

Resulta que, como detesto ambos, não escolho nenhum; mas, como hei-de, em certa ocasião, ou sonhar ou agir, misturo uma coisa com outra.
Le livre de l'intranquillité 2

Je dois choisir - ce que je déteste - entre le rêve, que mon intelligence exècre, et l'action, que ma sensibilité réprouve; ou l'action pour laquelle je ne suis pas né, ou le rêve pour lequel personne n'est jamais né.

Il en résulte que, détestant les deux, je n'en choisis aucun ; mais comme il faut bien choisir, en certaines occasions, de rêver ou d'agir, je mélange une chose avec l'autre.

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à M.C.



Entre les ronceraies du coteau
Et les cils de la rivière
Ce pommier d’une écorce rude
Où s’attache un gui
Voilà notre vie pleine et nos joies
Ces fruits blancs appendus
Pour une année qui s’achève
Voilà sur le seuil des récoltes
Notre longue patience
Et lié ce vœu
Sous le linteau de la porte