HŌEIDŌ


Le monde a disparu, ce monde, qui nous est étranger. Nous n'avons plus que les traces d'un gibier, qu'une ombre, le résultat d'un travail effectué dans une sobriété de moyens par trois artistes qui inventèrent, sans y toucher, quelque chose comme la photographie qu'à cette époque nous-même nous inventions.

Car chacun de ces relais, chacune de ces étapes est une appréhension. Bouts de vie un instant arrêtées. Un ploc dans l'eau du temps dirait Bashô. Le mouvement de la main qui signe un caractère, kanji, cangjie du style d'herbe où le vent souffle.

J'aurai voulu par une forme se rapprochant les rejoin- dre. Lui d'abord qui dessine, celui-là qui a vu. L'œil. Et puis les autres, ceux qu'on oublie ; le graveur soucieux d'une fidélité extrême qui reprend comme un sel d'argent les traits ; l'imprimeur qui renverse les encres et nous révèle toute une foison de couleurs, une estampe.

Les marques de pluie sur le mur débordant des gout- tières. Le forage des insectes dans les linéaments du bois.

M'inscrire dans cette histoire d'une pointe cachée.

Ajouter une ligne qui doit être plastique, un effet de ten- sion, et vivante, du début à la fin du poème.

Et jamais ne jouer le rôle
d'un truchement

Utagawa Kunisada, Toyokuni III
(1786–1865) - Portrait à la mémoire d'Hiroshige

保永堂

( Jirôbe – Hyôbe – Hichiryûsai )

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à M.C.



Entre les ronceraies du coteau
Et les cils de la rivière
Ce pommier d’une écorce rude
Où s’attache un gui
Voilà notre vie pleine et nos joies
Ces fruits blancs appendus
Pour une année qui s’achève
Voilà sur le seuil des récoltes
Notre longue patience
Et lié ce vœu
Sous le linteau de la porte