Depuis longtemps, ces phrases que j’ai pu dire sont sans mémoire – depuis longtemps ces phrases (réécrites sans cesse) n’ont plus de liens avec moi-même
Elles sont
comme des gens à qui je parle, ou qui me parle, mais que j’écoute à peine
– Fasciné par leur physionomie, la fréquence et le rythme des mots qui s’en vont ou qui viennent
en tous sens –
J’ai le souvenir sensible d’une inflexion de voix, d’un geste de la main ; je note avec une précision photographi- que,
une mimique musculaire, l’émotion affichée sur leur visage, une expression faciale qui les éclaire
Mais ce qu’ils ont pu me dire, ne m’en souviens – et que leur ai-je dit déjà de mon côté,
à eux, voulais-je m’adresser vraiment – et eux était-ce à moi qu’ils voulaient s’adresser ?
Car ces phrases me sont devenues
étrangères
et ont suivi leur voie.
Nous vivons,
séparés par l’oubli désormais. Nos chemins
de vie sont parallèles
étrangères
et ont suivi leur voie.
Nous vivons,
séparés par l’oubli désormais. Nos chemins
de vie sont parallèles
Henri-Michaux Meidosem (1948) |
Grand Cahier.634.Alentour de Soares.002.Trois fils.03